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François-Étienne Cugnet
Thème : Économie

François-Étienne Cugnet et le commerce de la Traite de Tadoussac à partir de 1720

Camil Girard, Groupe de recherche Histoire (GRH), Université du Québec à Chicoutimi. 2003


C'est sous la gouverne de Cugnet que l'économie des fourrures reprend son élan au Saguenay à partir de 1720. Les deux grands objectifs qu'il poursuit pour réorganiser la Traite consistent à s'assurer d'une clientèle nombreuse et régulière dans les postes et à se soucier de conservation. Né à Paris en 1688, François-Étienne Cugnet a une formation en droit civil ou commercial de l'Université de Paris. Il allie à ces connaissances les qualités d'un entrepreneur et d'un marchand dynamique. Dès son arrivée en Nouvelle-France en 1719, il entreprend son ascension sociale. Directeur du Domaine jusqu'en 1737, puis sous-locataire de 1737 à 1749, Cugnet rentabilise la Traite de Tadoussac au point où ses adversaires lui reprochent de tirer trop grand profit de cette activité, considérant les coûts peu élevés de location qu'il doit payer ainsi que les frais divers d'opération. Outre l'activité qu'il mène pour exploiter le Saguenay, Cugnet devient, en 1730, membre du Conseil supérieur, le plus haut tribunal de la colonie. Dès 1733, il apparaît comme une figure dominante dans la société qui allait devenir la compagnie des Forges du Saint-Maurice.

Il est difficile d'établir précisément l'importance de la traite pendant le règne de Cugnet. Durant son bail, il ne cesse de se plaindre des maigres profits qu'il retire de son commerce au Saguenay. Dans sa comptabilité officielle, il prétend qu'il n'a fait que 937 livres 13 sols et 3 deniers de profit entre 1737 et 1741. Après vérification, l'intendant Hocquart, son protecteur, estime toutefois que les profits auraient atteint 42 000 livres pendant les cinq premières années du bail. Pour une période de dix ans pendant laquelle Cugnet détient des droits sur le Domaine, l'historien Cameron Nish estime qu'il a retiré un profit annuel moyen de 10 719 livres. Le coût de son bail s'élevait à 4 500 livres en début de période et atteignait 6 000 livres à la fin. Des recherches plus récentes confirment que les profits annuels de Cugnet se situeraient effectivement aux alentours des chiffres établis par Nish. On aura idée de l'importance de ses profits en se rappelant que vers la même époque le salaire annuel d'un artisan, armurier ou tonnelier, se situe à quelque 375 livres.

L'intendant Bigot, qui soupçonne Cugnet d'avoir retiré des profits exagérés de la ferme de Tadoussac, s'empresse, à l'automne 1749, de l'allouer à Marie-Anne Barbel, veuve Fornel, moyennant une location annuelle de 7 000 livres. Pendant l'occupation de son bail qui dure jusqu'en octobre 1755, ses recettes moyennes s'élèveraient entre 18 000 et 20 000 livres. Considérant l'inflation galopante due à la guerre, il faut évaluer ces chiffres avec prudence et ne pas leur imputer le signe d'un changement en profondeur de ce commerce au Saguenay. La reprise de la Traite par le roi de France à partir de 1755 n'est peut-être pas étrangère au fait que celui-ci cherche à accroître par tous les moyens ses revenus pour financer la guerre qu'il mène en Nouvelle-France contre son ennemi séculaire, l'Angleterre. Il reste qu'à la fin du Régime français, la Traite du Domaine est suffisamment bien organisée pour permettre aux intervenants de tirer profit de leur activité.


Bibliographie :
 
Girard, Camil et Normand Perron. Histoire du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, 1989. 665 p.
 
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