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Caisses populaires et coopération
Thème : Économie

Caisses populaires et coopération au Saguenay–Lac-Saint-Jean

Laurie Goulet et Camil Girard, Groupe de recherche Histoire (GRH), Université du Québec à Chicoutimi. 30 octobre 2003


Lorsque Alphonse Desjardins fonde la première caisse populaire à Lévis en 1900, il est loin de se douter du succès que connaîtrait ce concept de crédit et d'épargne dans les régions. Au Saguenay–Lac-Saint-Jean, une première caisse populaire est fondée à Chicoutimi en 1911, en présence de Desjardins. Dix années passeront avant que ne naisse une deuxième caisse populaire dans cette région, cette fois à Val-Jalbert. À partir des années 1920, les Saguenayens et les Jeannois commencent à s’intéresser davantage au concept de crédit et d’épargne de Desjardins.
 
Avant l'arrivée des caisses populaires Desjardins, la ville de Chicoutimi possédait une Caisse de Petite Économie. Cette coopérative poursuivait un objectif semblable à celui de Desjardins, c'est-à-dire favoriser l'épargne chez les petits épargnants, en particulier. Une quinzaine de municipalités ont de comptoirs de Caisse de Petite Économie, mais ils ne survivront pas au mouvement Desjardins. La Caisse de Petite Économie est dissoute en 1926 en partie parce qu'elle ne s'adressait qu'aux ouvriers, contrairement à Desjardins qui souhaitait desservir les agriculteurs et la population en général. 
 
Les deux premières caisses Desjardins sont fondées à Chicoutimi (Caisse populaire de Chicoutimi) et à Val-Jalbert. Ces établissements recrutent alors la majorité de leurs sociétaires parmi les ouvriers des compagnies de pâte qui sont établies dans ces localités. Pour les ouvriers salariés, les caisses populaires servent principalement à l'épargne et à l'emprunt pour l'achat de biens durables. Cependant, la caisse populaire de Val-Jalbert éprouvera des difficultés en raison de la préférence des ouvriers pour Banque Nationale de l'endroit. Cette institution financière fait d’ailleurs concurrence aux caisses populaires un peu partout dans la région. La caisse de Val-Jalbert ferme finalement ses portes en 1927 alors que l’avenir de cette localité est fortement compromis. 
 
Malgré les difficultés et la fermeture de la caisse de Val-Jalbert, les coopératives de crédit et d’épargne de Desjardins suscitent l’intérêt au cours des années 1920. Des membres du clergé encouragent la fondation de caisses populaires et prennent même en charge les principales fonctions administratives. Entre 1921 et 1931, neuf nouvelles caisses sont fondées. Jusque vers la fin des années 1920, les caisses se portent généralement bien, l'actif augmente et le nombre de sociétaires également. Cependant, la crise économique vient noircir le tableau. Plusieurs caisses doivent fermer leurs portes, car elles sont incapables de faire face aux problèmes financiers. Par exemple, la caisse populaire de Chicoutimi cesse ses activités de 1928 à 1943. Mais immédiatement après les pires années de la Crise économique des années 1930, le mouvement Desjardins reprend son expansion et entre 1936 et 1945, quarante-quatre caisses sont créées, dont trente-quatre au Lac-Saint-Jean. 
 
À la fin des années 1940 et au cours des années 1950, les sociétaires déposent davantage leurs économies dans leurs caisses locales. C'est aussi à cette époque que le mouvement Desjardins se fait connaître dans les écoles et que débute la fondation de caisses scolaires. Cela permet d’inculquer aux plus jeunes les vertus de l’épargne. En 1957, dix écoles de Chicoutimi et quatre de Rivière-du-Moulin possèdent des caisses scolaires. D’autres écoles de la région ont aussi emboîté le pas à cette initiative.
 
Afin de consolider et de promouvoir le développement des caisses, leurs principaux dirigeants créent en 1943, à Saint-Jérôme de Métabetchouan, l'Union régionale des Caisses populaires du diocèse de Chicoutimi. Le siège social est établi à Chicoutimi et l’Union dessert les caisses des comtés de Chicoutimi, Lac-Saint-Jean et Roberval. En 1979, cette association devient la Fédération des Caisses populaires du Saguenay–Lac-Saint-Jean.
 
Entre 1911 et 1978, 86 caisses populaires sont fondées au Saguenay–Lac-Saint-Jean, ce qui veut dire que la majorité des municipalités sont desservies par le mouvement Desjardins. Au cours des dernières décennies, des caisses ont fermé et d’autres ont été fusionnées pour améliorer les services et leur rentabilité. Mais le mouvement Desjardins reste toujours aussi important dans la région. Il a permis la mise en place de services basés sur la coopération et l'épargne dans tous les milieux. Il a contribué à former des administrateurs à l'échelle locale ainsi qu'à sensibiliser les populations à diverses réalités économiques. À l'heure de la nouvelle économie et des technologies de pointe, de nouveaux défis sont posés au mouvement coopératif. Aussi, pour répondre aux besoins du développement régional et rural, les Caisses Desjardins devront continuer à faire la promotion du mouvement coopératif autour des valeurs profondes qui l'animent. 
 
 
Bibliographie :

Girard, Camil et Normand Perron. Histoire du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, 1989. 665 p.
Bouchard, Russel. Les caisses populaires Desjardins au Saguenay—Lac-Saint-Jean, Chicoutimi, 1989. 147 p.
[Perron, Normand]. Les 75 ans de ma caisse, 1911-1986, Chicoutimi, 1986. 37 p.
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