Thème :
Territoire et ressources
La population du Saguenay–Lac-Saint-Jean
Étienne Troestler, Cégep de Jonquière, 13 novembre 2002
L’assise d’une région repose sur son territoire, et les caractéristiques qui la distinguent : relief, climat, sol et sous-sol, ressources de tout acabit. Mais le cœur même d’un territoire, c’est sa population. Pour une région qui se classe au troisième rang pour sa taille, le Saguenay–Lac-Saint-Jean ne se classe qu’au neuvième rang pour sa population et au quatorzième rang pour sa densité. La situation de la région, au nord de l’axe du Saint-Laurent, et son statut de région-ressource et sa jeunesse relative (165 ans) peuvent expliquer en partie cet état de fait.
Longtemps considéré comme « Royaume des Fourrures », le territoire appartenant par bail à de grandes compagnies ne pouvait être colonisé. Une série de facteurs sociaux et politiques aura permis l’ouverture de cette immense région. Les parties baptisées Haut-Saguenay (limites actuelles de Ville de Saguenay) et Bas-Saguenay (de La Baie à Tadoussac) doivent leurs premiers développements à des colons venus de Charlevoix. Les basses terres autour de la cuvette du lac Saint-Jean se sont développées surtout par des gens issus de la région de Kamouraska. Dans la Fabuleuse histoire d’un Royaume, l’auteur prête au premier évêque du diocèse, Monseigneur Dominique Racine, la prévision qu’un jour la population de la région atteindra un demi million, un million peut-être. Or le rêve s’arrêtera en 1996 ou la population régionale atteindra 296 777 habitants. Au recensement de 2001, en 5 ans, la population aura perdu près de 12 000 personnes.
La dénatalité, l’exode des jeunes et le vieillissement de la population seront responsables de ce recul. La plupart des autres régions dites périphériques connaîtront le même phénomène. Les régions gagnantes seront les régions centrales de l’axe du Saint-Laurent. Si en 1971, le poids démographique régional équivalait à 4,4 % de celui du Québec, ce pourcentage avait fondu à 3,8 % en 2001. De 1991 à 2001, la région perdait 2,6 % de sa population, et le Bas Saint-Laurent, la Côte Nord, la Gaspésie et le Nord du Québec connaissaient des reculs encore plus marqués. Dans cette même période, les régions de Lanaudière et Laurentides voyaient leurs populations augmenter de 16 et de 22 %. Alors que la densité, ce rapport du nombre d’habitants par kilomètre carré, est de 5 au Québec, il n’est que de 3 au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Dans notre région, la population est majoritairement urbaine avec autour de 7 personnes sur 10 qui privilégient de vivre en ville.
Qui dit ville en région reconnaît l’existence d’un pôle dominant au Haut-Saguenay, d’un pôle secondaire important à la tête du lac Saint-Jean et de 3 autres pôles dépassant les 10 000 personnes, tous les 3 autour de ce même lac (à cet effet, les cartes d’attraction urbaine en référence sont éloquentes). Le regroupement imposé des 3 anciennes villes dans le Haut-Saguenay (Chicoutimi, Jonquière et La Baie) ainsi que leurs banlieues respectives (Shipshaw, Laterrière, Lac Kénogami et Canton Tremblay) donnait naissance à la plus grande ville du Québec en superficie et sixième en population. : Ville de Saguenay, avec plus de la moitié de toute la population régionale. Alma, trait d’union entre le Saguenay et le lac Saint-Jean dépasse aujourd’hui les 30,000 habitants, deux fois la population de Dolbeau-Mistassini (une autre fusion), et trois fois les municipalités de Roberval et Saint-Félicien. Plusieurs municipalités de la région, plus d’une vingtaine, ont des populations inférieures à 1000 personnes. Certaines de ces municipalités sont plus éloignées des centres urbains, et ont une vocation souvent agro-forestière. On en retrouve plusieurs au Bas-Saguenay, le long du fjord, alors que d’autres sont en périphérie de la cuvette du lac Saint-Jean.
La population régionale est un peu plus masculine que féminine. En effet, en 2001, la région décomptait 142 839 hommes de tous âges contre 141 951 femmes, soit une différence de 888. En pourcentage, cela représente 50,15 % de sexe masculin pour 49,85 % de sexe féminin. La population du Saguenay lac saint Jean a une structure par âge comparable à celle de l’ensemble de la province. En effet, 17 % de la population régionale se situe entre 0 et 14 ans, 71 % entre 15 et 65 ans et 12 % ont plus de 65 ans. La population active, celle qui travaille se répartit inégalement dans les trois grands secteurs d’activité économique. Le secteur primaire, celui qui regroupe l’agriculture, les mines les forêts et la pêche est le plus faible avec un petit 5 %. Le secteur secondaire, celui de la transformation industrielle va chercher 20 % alors que le secteur tertiaire, celui des services, est le plus important.
Dernière caractéristique démographique, avec une connotation sociale, celui de la scolarité. Alors que la région comptait en 2001 136 écoles primaires et secondaires, 4 cégeps et une université régionale, la population du Saguenay–Lac-Saint-Jean est moins scolarisée que dans l’ensemble du Québec. En effet, 37 % de la population régionale a une scolarité de niveau post-secondaire comparativement à 42 % au Québec. Une personne en région sur trois possède un diplôme collégial et seulement 8 % de la population a en poche un diplôme universitaire.
Avec ces statistiques et le niveau de chômage que connaît la région, pas étonnant qu’autant de gens en région s’inquiètent de son avenir. On raconte que c’est l’équivalent d’un autobus de jeunes par semaine qui quitterait la région, dans l’espoir d’un travail, d’un salaire plus élevé, ou pour aller faire des études dans des programmes non offerts en région. Espérons que tous ces jeunes en quête de jours meilleurs reviendront dans leur région natale, pour qu’au Québec, les régions comme les nôtres demeurent fortes et en santé.
Bibliographie :
Évolution de la population par région administrative 1991-2001
Données démographiques régionales
Données sommaires sur la région administrative du SLSJ
Caractéristiques démographiques Haut Saguenay
Carte de l’écoumène généralisé, SLSJ
Répartition de la population SLSJ, 2001
Cartes sur les attractions urbaines SLSJ
Coup d’œil sur la population : essai historique de Gilles Boileau