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Silence on tourne !
Thème : Culture

Silence on tourne ! chez les Topping, au Témiscamingue 

Marc Riopel, Ph.D. Histoire, À travers le temps enr., Hudson, 10 octobre 2002


Le site communément appelé aujourd’hui Topping, à proximité de l’embouchure de la rivière Kipawa et du lac Témiscamingue, possède une histoire fort intéressante. Au début du siècle, ce site appartient à la famille Fleury, de Ville-Marie, qui vient y passer ses étés. M. Fleury profite de ses séjours pour s’adonner au trappage dans le secteur de l’embouchure de la rivière Kipawa. Les Fleury demeurent propriétaires de ce site environ sept ans, soit de 1908 à 1915. Ils vendent cette propriété à un Américain du nom de Fred Arnott. Ce dernier modifie considérablement la vocation de ce site. Demeurant à New York, il possède de bons contacts avec des cinéastes et en convainc quelques-uns à tourner des films sur sa propriété. Deux films seront réalisés à cet endroit dans les années 1920 et 1930. Les environs de ce site restent peu fréquentés jusqu’aux années 1980, alors que des promoteurs témiscamiens développent un sentier écologique à proximité du site Topping. 
 
Le tournage du film Silent Ennemy, par la Burden Pictures, a lieu approximativement entre 1925 et 1927. Les artistes, les producteurs et le matériel arrivent en hiver par chemin de fer et des gens de Fabre sont embauchés pour effectuer le transport de la gare au site du tournage, sur le lac Témiscamingue. Le film traite des relations entre les Blancs et les Algonquins, principalement l’établissement des Blancs et la dépossession du territoire ancestral des Algonquins. Ceux-ci sont obligés de se replier constamment vers le nord. L’ennemi silencieux raconte l’histoire des Blancs qui, en colonisant le territoire, enlèvent la nourriture et les fourrures aux Algonquins. 
 
Le second film, Snow Bride, est tourné entre 1929 et 1932 par la Paramount Pictures. La distribution comprend, comme têtes d’affiche, Alice Bready, la fille du garde-chasse, et Lefty Flynn, le garde-chasse. Environ 200 Algonquins figurent dans ce film. Les figurants proviennent de la région, tandis que les acteurs algonquins viennent des États-Unis. À eux s’ajoutent quelques personnes de la région. Mentionnons Marie Laforest joue le rôle d’une Indienne qui a une petite fille, Marie Fleury. Des travailleurs de la région sont aussi embauchés pour diverses tâches, sous la supervision de Zéphirin Fleury. Pour les besoins du film, des Témiscamiens capturent des animaux sauvages, entre autres des orignaux, des chevreuils, des ours et des loups.
 
Après l’époque des films, Arnott transforme cet endroit en colonie de vacances. Un été, deux jeunes américains, entre autres, y séjournent, Dan et Bob Topping. Émerveillés par la beauté naturelle de ce site, ils communiquent avec leur mère et lui conseillent de visiter cet endroit. Mme Topping trouve, à son tour, le site très beau et décide de l’acquérir. Au milieu des années 1930, Fred Arnott vend le site et les bâtiments à cette dame. Celle-ci l’utilise comme lieu de repos et y passe la majeure partie de l’été avec ses deux fils. Mme Topping possède un avion et un bateau pour les besoins urgents. Elles embauchent des gens de Fabre pour s’occuper de la cuisine, faire du bois de poêle, conduire le bateau et pour autres besoins spécifiques.
 
Plus tard, Dan et Bob Topping, qui sont alors les détenteurs majoritaires des actions du Yankee’s Stadium de New York, héritent du site et des dépendances. À cette époque, un des fils Topping se marie avec l’actrice Lana Turner et l’amène passer quelque temps à cet endroit dans les années 1950. Le site demeure la propriété des Topping jusqu’au début des années 1960. Ils embauchent des surveillants pour garder les bâtiments pendant leur absence l’hiver. Albert Lavallée y travaille comme gardien pendant plusieurs années. C’est à cette époque que le site prend le nom de la famille Topping. Les frères Topping vendent finalement leur propriété à la compagnie Gueupel. Cette compagnie cédera à son tour la propriété à Scott Sorenson, originaire de l’Utah, qui vient y passer l’été avec sa famille. Il en est encore propriétaire en 1990. 
 
Au début des années 1980, quatre personnes du Témiscamingue conçoivent un projet de sentier écologique, longeant la rivière Kipawa et se rendant à proximité du site Topping. Ce groupe réunit Henri Laforest et Jean-Yves Pellerin, de Fabre, Jacqueline Perreault, de Laniel, et Donald Barrette, de Lorrainville. Le but poursuivi consiste à mettre en valeur le potentiel écologique de cet endroit. Ils obtiennent d’abord du gouvernement du Québec la reconnaissance du statut de site écologique, le protégeant ainsi contre d’éventuels travaux d’exploitation forestière. Le terrain protégé s’étend du barrage de Laniel jusqu’aux grandes chutes et comprend une distance de 180 mètres de chaque côté de la rivière Kipawa. Pour les trois quarts de son étendue, il s’agit d’un site vierge, puisqu’il n’a jamais fait l’objet d’une coupe de bois. Il est l’un des rares sites de ce genre au Québec. 
 
Pour aménager un sentier sur ce site, les promoteurs obtiennent des subventions dans le cadre de divers programmes gouvernementaux, ce qui leur permet d’embaucher des étudiants et des chômeurs pour effectuer différents travaux. Un sentier pour la marche est ainsi aménagé le long de la rivière Kipawa sur une longueur d’environ sept kilomètres. Le parcours est enrichi d’une attraction particulière, un pont suspendu permettant de traverser un ruisseau en temps de crue des eaux. Un sentier pour automobile est aussi aménagé. Il part de la route 101 et se rend à 15 minutes de marche des grandes chutes. Ce sentier écologique porte le nom de sentier des Marmites de géants. Il reste à réaliser un centre d’interprétation des essences forestières rencontrées sur le parcours. Le sentier des Marmites de géants aurait pu se continuer jusqu’au site Topping, si l’achat de cette propriété avait été possible.  
 
 
Bibliographie :

Laforest, Henri. Entrevue réalisée par Marc Riopel. Fabre, Multi-Diffusion enr., 20 novembre 1989. 60 minutes.
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