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Cage et radeau de bois
Thème : Économie

Cage et radeau de bois, 1836-1900

Marc Riopel, Ph.D. Histoire, À travers le temps enr., 19 septembre 2002

 
À chacune des époques de l’exploitation forestière, les marchands profitent de la configuration du bassin hydrographique pour transporter leur bois des zones d’abattage, parfois situées dans les parties les plus éloignées du Témiscamingue. À l’époque du bois équarri, les marchands utilisent la méthode des cages de bois pour transporter sur les rivières les énormes pièces de bois. La fonte des glaces au printemps annonce le début de la période de flottage du bois, désigné par le terme de drave. Cette activité se poursuit jusqu’à la fin de juillet. Pendant l’été, les entrepreneurs effectuent des travaux d’amélioration aux cours d’eau en construisant glissoirs et barrages de rétention afin de faciliter le transport du bois. L’intensification du flottage du bois entraîne la nécessité de former une compagnie de régularisation de cette activité sur la rivière des Outaouais et le lac Témiscamingue. 

Entre 1836 et 1900, le bois équarri coupé dans le secteur du lac Témiscamingue est assemblé en cages afin d’être expédié au port de Québec. Généralement, une cage comprend 20 pièces de bois retenues ensemble par deux gros morceaux de bois servant de flotteur. Une telle cage pèse 40 tonnes. Ces cages flottent sur les différentes rivières telles que Des-Quinze, Blanche, Kipawa, Montréal et Gordon, jusqu’au lac Témiscamingue. Là, elles sont regroupées l’une à la suite de l’autre, pour former un radeau de bois. En moyenne, un radeau de bois regroupe 72 cages et contient 1 440 pièces de bois équarri, quoiqu’il n’est pas rare de voir, en provenance du Témiscamingue, des radeaux de 80 à 100 cages, contenant 2 000 pièces de bois équarri. 

Les radeaux se déplacent également à l’aide de rames ou d’une voile, dirigés par une équipe de 22 draveurs. Cet équipage se compose, outre des draveurs, d’un cuisinier et de ses aides, qui demeurent dans des tentes de toile montées sur le radeau. Il s’agit de « voyageurs » dont le contrat d’embauche stipule qu’ils doivent conduire les radeaux de bois jusqu’à Québec. Le travail des draveurs se termine au port de Québec. Les cages y sont démontées et le bois est vendu à des marchands qui l’expédient en Angleterre. Dans les années 1890, les compagnies à l’œuvre au Témiscamingue embauchent à l’occasion des Algonquins, à titre de draveurs, pour descendre les radeaux de bois. 

Les rapides et les chutes constituent des obstacles naturels qui se dressent sur la route des radeaux de bois. Pour franchir les rapides sur une rivière, les draveurs démontent le radeau de bois, y dirigent une à une les cages de bois et remontent ensuite le radeau en eau calme. Les chutes de la rivière des Outaouais, notamment celle des Chaudières qui a une déclivité de 12 mètres, posent des problèmes fort différents aux draveurs. Ils doivent démonter toutes les cages et faire descendre une à une les pièces de bois. Puis, il leur faut plusieurs semaines pour récupérer tout le bois et assembler à nouveau les cages et les radeaux. La construction d’un glissoir par Ruggles Wright, en 1829, permettra d’éviter ce fastidieux travail, en plus de réduire de moitié le temps nécessaire à un radeau de bois pour franchir la distance du lac Témiscamingue au port de Québec. Désormais, les draveurs défont le radeau et font passer une à une les cages de bois. 

La présence de nombreuses compagnies de bois et d’autant d’équipes de draveurs sur la rivière des Outaouais n’est pas sans causer quelques problèmes, notamment celui de faire passer ses radeaux de bois en premier dans les rapides et dans les glissoirs. Il n’est pas rare que des batailles surviennent entre des draveurs de compagnies différentes afin de s’octroyer le privilège d’être le premier à franchir une chute ou un rapide. Cela soulève la question de la réglementation du transport du bois sur l’eau et, à cette fin, une compagnie est mise sur pied. Ainsi, le 4 décembre 1866, les marchands de bois, intéressés au flottage sur la rivière des Outaouais, fondent la Upper Ottawa Improvement Co., mieux connue sous le sigle incomplet ICO. 

Ses principales tâches consistent à régulariser le flottage du bois pendant la saison, à livrer le bois aux moulins des compagnies, à aménager les chutes et les rapides des rivières et à fixer les coûts de transport du bois sur le parcours. Son territoire original couvre une zone qui s’étend de la ville d’Ottawa aux rapides des Joachims, sur la rivière des Outaouais. En 1888, il est élargi au lac Témiscamingue, jusqu’à la rivière Des-Quinze. La ICO s’attaque rapidement à l’aménagement de la rivière des Outaouais et de ses tributaires pour faciliter le flottage du bois. Des travaux sont alors effectués sur la rivière Des-Quinze qui cause sa part de maux de tête aux marchands qui y font flotter leur bois, notamment en raison des 15 rapides qui parsèment son parcours, et desquels elle tient son nom. De tels travaux sont également entrepris sur la rivière des Outaouais entre Mattawa et le lac Témiscamingue et sur le ruisseau Gordon. 

Mettant à profit ses importantes ressources forestières, le Témiscamingue expédie de nombreuses cages de bois entre 1836 et 1900. Les cages sont assemblées pour former un train de bois qu’une équipe de draveurs dirigent jusqu’au port de Québec. En cours de route, de nombreuses embûches se présentent, notamment les chutes et les rapides. Des améliorations sont peu à peu apportées aux cours d’eau afin de faciliter le passage des cages de bois. Par ailleurs, l’intensification des activités du flottage du bois entraîne la mise sur pied d’une coopérative, la ICO, chargée de faciliter le flottage du bois et de livrer le bois à ses membres. 


Bibliographie :

Archives Deschâtelets. Codex historicus de la mission Saint-Claude. Volume 3, 1886-1894, Mission du Long-Sault, été 1886. 
Chénier, Augustin. Notes historiques sur le Témiscamingue. Ville-Marie, Société d’histoire du Témiscamingue, 1980. 137 p., 2e édition. 
Mackay, Donald. The Lumberjacks. Montreal, McGraw-Hill Ryerson Limited, 1978. 319 p. 
McLaren, David. Turn of the Century …Stories about northern pioneers from the early 1900’s. Cobalt, Highway Book Shop, 1992. 152 p. 
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