Thème :
Société et institutions
Sir Adolphe-Basile Routhier (1839-1920), auteur du texte de l’hymne national canadien
Serge Gauthier. Historien et ethnologue. Président de la Société d’histoire de Charlevoix. Notre-Dame-des-Monts, 3 octobre 2002
« Ô Canada
Terre de nos aieux
Ton fron est ceint
De fleurons glorieux »
Les paroles de l’hymne national canadien le « Ô Canada » sont familières à tous les Canadiens de langue française. Certains savent que la musique de cet hymne a été composée par Calixa Lavallée. Bien peu toutefois retiennent le nom de l’auteur de ce texte, Adolphe-Basile Routhier qui fut un homme de loi et homme de lettre.
Né à Saint-Placide dans le comté de Deux-Montagnes le 8 mai 1839, Adolphe-Basile Routhier fréquente le Séminaire de Sainte-Thérèse et fait ensuite des études de Droit à l’Université Laval. Il est admis au barreau le 3 décembre 1861. Il s’établit alors à Kamouraska. Il tente à deux reprises de se faire élire dans le comté de Kamouraska mais il n’y parvient pas. Conservateur de stricte allégeance, Routhier est un ultramontain fidèle à la doctrine de l’Église Catholique. Il est nommé juge de la Cour Supérieure pour le District du Saguenay le 1er septembre 1873. Routhier siège alors au Palais de Justice de La Malbaie. Il réside durant cette période dans une maison du Boulevard des Falaises à Pointe-Au-Pic.
Le juge Routhier préside au Palais de justice de La Malbaie en 1876 le procès de l’influence indue qui oppose les hommes politiques Pierre-Alexis Tremblay et Hector Langevin. Dans un jugement très détaillé, Routhier exonère totalement les prêtres de Charlevoix et il refuse de donner suite à la demande de Pierre-Alexis Tremblay visant à faire annuler l’élection d’Hector Langevin comme député de Charlevoix. Porté en appel, le jugement de Routhier est renversé quelques mois plus tard par un juge plus libéral qui annule l’élection. Le 10 décembre 1889, Routhier est nommé dans le District de Québec. Il devient juge en chef le 30 septembre 1904 mais prend sa retraite en 1906.
En parallèle à sa carrière d’homme de loi, Adolphe-Basile Routhier mène une carrière littéraire. Il publie de nombreux ouvrages dont quelques titres ressortent davantage: En Canot, À travers l’Europe, À travers l’Espagne, Conférences et discours. Ces livres sont le plus souvent des récits de ses voyages au Canada ou en Europe. Son œuvre littéraire la plus marquante reste sans doute l’écriture des paroles du chant « Ô Canada, terre de nos aïeux ». Écrit en 1880 à l’occasion des fêtes de la Saint-Jean-Baptiste, ce chant fait partie de l’histoire nationale du Canada dont il devient l’hymne national le 1er juillet 1980.
Adolphe-Basile Routhier est aussi un amoureux de la région de Charlevoix mais plus précisément de Saint-Irénée où il possède une splendide maison qu’il désigne du nom de « Hauterive ». La population nomme plutôt cette demeure « Notre château blanc » faisant ainsi référence au revêtement blanc de l’édifice. Routhier aime beaucoup regarder le fleuve de sa galerie et la magnifique nature de Saint-Irénée l’inspire dans sa création littéraire. Un historien amateur, Alphonse Boily, affirme même dans le journal Le Confident dans les années 1960 qu’Adolphe-Basile Routhier trouve l’inspiration de son texte du « Ô Canada » à Saint-Irénée. Ce fait est plausible et il faudrait donc reconnaître Saint-Irénée dans Charlevoix comme le berceau de l’hymne national canadien.
Adolphe-Basile Routhier meurt le 27 juin 1920 à Saint-Irénée où il a passé une douce retraite. Malheureusement, sa magnifique résidence résiste mal à l’usure du temps; elle est démolie en 1940. À titre d’hommage, le 12 septembre 1992, à l’occasion du 125e anniversaire de la Confédération canadienne, la population de Saint-Irénée nomme la bibliothèque municipale de l’endroit du nom d’Adolphe-Basile-Routhier. Le souvenir de cet homme de loi et de cet amateur de littérature reste ainsi présent à la mémoire de la population de ce village charlevoisien.
Bibliographie :
Gauthier, Serge. « Saint-Irénée. Berceau de l’hymne national canadien », Le Journal de Charlevoix, 1, 10, 24 juin 1992, p. 12.