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Le chemin des Caps
Thème : Société et institutions

Le chemin des Caps

Christian Harvey. Historien. Société d’histoire de Charlevoix. La Malbaie, 25 juillet 2002

 

Plus d’un siècle après l’établissement des premiers colons, la région n’a toujours pas de lien de communication terrestre avec la Côte-de-Beaupré, le territoire de peuplement le plus proche. Les colons de Baie-Saint-Paul doivent emprunter la voie maritime pour se rendre à Québec et ils évitent ainsi les imposants caps entre Baie-Saint-Paul et Saint-Joachim. Les seigneurs de la région notamment exigent la construction d’une route afin de relier la région au reste du monde. Il faut attendre l’établissement de colons dans le secteur des Caps au début du 19e siècle avant qu’une route soit enfin tracée. 
 
Dès 1745, des habitants de Petite-Rivière, des Éboulements et de Baie-Saint-Paul présentent une demande devant le Grand Voyer afin qu’une route soit érigée jusqu’à la Petite Ferme de Saint-Joachim. Deux tracés sont proposés : l’un longeant le fleuve, l’autre dans les terres. Toutefois, le projet avorte. En 1765, c’est au tour des seigneurs d’exiger la construction d’une route dans le secteur des Caps. D’autres projets reviennent par la suite, mais ne se concrétisent pas. Le peu d’importance stratégique de la région et son caractère périphérique expliquent peut-être le peu d’empressement pour la construction de cette route. 
 
L’attente s’explique aussi par des contraintes reliées à la manière de construire les routes l’époque. En effet, il n’y a pas à cette époque de « contracteurs » chargés de la construction et de l’entretien des chemins. Le Grand Voyer, nommé par l’État, se charge de réaliser les plans des routes sans toutefois mettre la main à la pâte. Ce sont ainsi le plus souvent les habitants eux-mêmes qui doivent se charger de la construction des routes, un travail harassant ne s’effectuant qu’avec une technologie rudimentaire. De plus, le gel et le dégel amènent la nécessité d’entretenir ces chemins sur une base régulière. Encore une fois, ce sont les franc-tenanciers, les habitants, qui doivent entretenir une section déterminée de la route. L’absence d’habitants dans un secteur – comme c’est le cas au 18e siècle dans le secteur des Caps - rend quasi-impossible l’entretien d’une route. La situation change au 19e siècle, à mesure que des colons viennent s’établir à Sainte-Tite-des-Caps et à Saint-Cassien. 
 
En 1815, le grand voyer convoque à Saint-Joachim l’inspecteur des chemins, trois habitants de chacune des paroisses concernées par la route et les seigneurs. Cinq ans plus tard, une route est en fonction entre la Côte-de-Beaupré et La Malbaie. Toutefois, l’état de la route est souvent lamentable. Le peuplement plus continu entre Sainte-Tite-des-Caps puis Saint-Cassien et quelques améliorations viennent rendre le tracé moins difficile. L’arrivée de l’automobile rend, de nouveau, au début du 20e siècle, utile une réfection en profondeur de cette route alors empruntée seulement par des charrettes ou des chevaux. Vers 1925, le Projet des Grandes Routes du gouvernement du Québec, vient améliorer la circulation dans le secteur des Caps grâce à un nouveau pavage mieux adapté à la circulation des automobiles. Toutefois, le passage des Caps est encore une épreuve fort longue et toujours dangereuse. Dans les années 1940, l’ouverture des routes l’hiver permet à la population de se rendre l’année durant à Québec. 
 
Vers 1975, la route des Caps connaît une amélioration notable alors que le député de Charlevoix, le libéral Raymond Mailloux, est ministre des Transports. Les nombreuses modifications apportées au tracé de la route permettent une circulation plus rapide et fluide. Les impacts pour la région seront à la fois positifs et négatifs. La région est maintenant plus facile d’accès pour les automobilistes. De nouveaux produits apparaissent alors comme le réseau d’auberges. L’instant d’un fin de semaine, Charlevoix devient une destination recherchée par des familles québécoises de la classe moyenne venues des centres urbains. Ce phénomène de tourisme de masse pallie par ailleurs quelque peu à la fin de la Croisière du Saguenay en 1965. Les communications plus faciles amènent par contre une partie de la population à délaisser les services et les commerces régionaux au profit des établissements de la ville de Québec. 


Bibliographie :

Serge Gauthier et Normand Perron. Histoire de Charlevoix. Québec, Presses de l’Université Laval, 2000. 387 p. 
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