Thème :
Éducation en classe
Le Séminaire de Chicoutimi : un établissement scolaire qui forme la jeunesse
Laurie Goulet, Groupe de recherche Histoire (GRH), Université du Québec à Chicoutimi. 2003.
Une région qui s'ouvre à la colonisation doit tout mettre en place. Cela comprend autant les maisons, les usines, que les écoles. Afin que les jeunes poursuivent leur cours primaire dans la région, l'abbé Dominique Racine propose la construction d'un séminaire à Chicoutimi. Le projet prendra cinq ans avant de se concrétiser. Depuis sa fondation en 1873, le Séminaire de Chicoutimi fait partie intégrante de l'histoire saguenayenne. Voyons les étapes de sa mise en place, ainsi que son évolution jusqu'au tournant de la Révolution tranquille.
Dès 1864, l'abbé Dominique Racine effectue des pressions auprès de l'archevêque de Québec, Mgr Elzéar-Alexandre Taschereau, afin d'obtenir un établissement d'enseignement supérieur. Cette année-là, un couvent pour filles est créé par le prélat avec la collaboration des sœurs du Bon-Pasteur. La demande d'un collège pour garçons est finalement acceptée le 18 avril 1872. L'école du village de Chicoutimi vend ses installations au curé Racine afin d'y établir le Séminaire qui est bénit le 15 août 1873 par Mgr Taschereau. L'établissement scolaire doit suivre les règlements du Petit et du Grand Séminaire de Québec et adopter le programme d'études du Collège Sainte-Anne de La Pocatière. L'abbé Racine est nommé Supérieur de l'institution.
Le but premier du Séminaire consiste à préparer des jeunes à la prêtrise afin d’assurer la relève du clergé séculier dans la région. L’institution assure aussi une formation aux jeunes qui désirent se lancer dans un profession libérale ou commerciale. Dès sa première année, soixante-et-un étudiants suivent les cours donnés par le Séminaire.
La popularité de l'école privée augmente rapidement et on doit agrandir les installations. Un nouvel édifice est donc construit dès 1875 sur la rue Jacques-Cartier. Deux ans plus tard, l'Université Laval affilie le Séminaire, une preuve de reconnaissance à l’extérieur de la région. En 1879, l'établissement d'enseignement reçoit la reconnaissance gouvernementale. Le Supérieur Dominique Racine, devenu entre temps le premier évêque de la région, écrira la Constitution de l'école qui acquiert ainsi une plus grande autonomie de gestion de ses affaires. À la mort de ce dernier, l'évêque Louis-Nazaire Bégin le remplace. Il met en œuvre des projets d'agrandissement. Le dernier évêque à être nommé Supérieur du Séminaire est Mgr Michel-Thomas Labrecque. À partir de 1896, les successeurs au poste de Supérieur seront désormais des enseignants de l'école.
Le nombre d'étudiants croît d'année en année : en 1881-1882, on compte cent élèves et en 1911-1912, on en compte trois cents. Dans la première moitié du 20e siècle, de cinq à six cents étudiants fréquentent le Séminaire à chaque année. Les coûts de scolarité étant assez élevés, les parents agriculteurs n'ont pas toujours les moyens de payer ces frais, c'est pourquoi l'institution accepte aussi bien l'argent sonnant que les biens de la terre.
En ce qui a trait aux cuisines et à l'entretien, différentes congrégations religieuses s'en occupent à tour de rôle. Finalement, à partir de 1904, les Antoniennes de Marie sont créées en partie pour assurer ces tâches.
Pendant le 20e siècle, le Séminaire diversifie ses activités : une classe affaire prend forme en 1897 puis de 1898 à 1942 un cours commercial est offert, et en 1939 on ouvre une école d'agriculture. L'institution favorise donc la formation d'une élite dans le secteur des affaires et du commerce. En 1944, le Séminaire installe des sections classiques un peu partout sur le territoire. Ces sections donneront des cours aux élèves faisant partie des diverses commissions scolaires de la région. Cela permet la création de deux juvénats, l’un à Dolbeau, l’autre à Desbiens et d'un second séminaire à Métabetchouan. En 1970, le Séminaire de Chicoutimi cède ses bâtiments au nouvel établissement créé par le gouvernement provincial : le Cégep (collège d'enseignement général et professionnel) de Chicoutimi. La concession s'est mise en place à la suite d'une cohabitation de quelques années.
Finalement, les changements de la Révolution tranquille feront dévier la vocation de l'établissement d'enseignement qui prendra en charge les cinq années du secondaire. Le Séminaire fêtera ses 130 ans d'histoire en 2003.
Bibliographie :
Girard, Camil et Normand Perron. Histoire du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, 1989. 665 p.
Hébert, Jean-François (directeur). Le Séminaire de Chicoutimi : 125 ans d'éducation au Saguenay, Chicoutimi, Société Historique du Saguenay, Cahiers de Saguenayensia, no 7, 1998. 52 p.