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Alexis Tremblay « Picoté » (1787-1859)
Thème : Économie

Alexis Tremblay « Picoté » (1787-1859), cultivateur et commerçant

Christian Harvey. Historien. Société d’histoire de Charlevoix. La Malbaie,s 30 septembre 2002


Au début du 19e siècle, l’Empereur Napoléon Bonaparte enclenche une série de conflits avec ses voisins européens. En 1806, Bonaparte et ses pays alliés mettent en vigueur un blocus continental à l’endroit de l’Angleterre. Cet État ne peut plus alors s’approvisionner en bois des pays scandinaves dont elle a tant besoin pour sa flotte navale. L’Angleterre se tourne alors vers ses colonies d’Amérique du Nord favorisant ainsi le développement d’une industrie forestière dynamique au Québec. Un Charlevoisien, d’abord simple cultivateur, désire profiter de ce marché alors fort lucratif. Alexis Tremblay Picoté au début du 19e siècle s’illustre comme un important commerçant de bois de la région et comme agent de la compagnie Price à La Malbaie. 
 
Alexis Tremblay naît le 14 juin 1787 à l’île aux Coudres de François Tremblay dit Picoté et de Marie-Madeleine Beauché dite Morency. À la fin du 18e siècle, il quitte l’île aux Coudres avec sa famille afin de venir prendre possession d’un lot dans la seigneurie de Murray Bay. Alexis Tremblay obtient à son tour en 1810 une première concession où il veut fonder une famille avec son épouse Marie-Modeste Boulianne. Il assure alors la subsistance à sa famille par la culture du sol. Néanmoins, Alexis Tremblay s’intéresse également au commerce et à l’exploitation forestière. 
 
Alexis Tremblay Picoté enclenche après 1830 l’exploitation forestière dans quelques chantiers de la région immédiate de La Malbaie. Néanmoins, il ne peut développer seul son entreprise car il ne possède pas les capitaux et les relations d’affaires nécessaires. L’écoulement du bois vers les marchés exige d’entretenir une collaboration étroite avec d’autres marchands de bois de La Malbaie, comme Thomas Simard bientôt devenu son associé, ou de grands marchands comme William Price de la ville de Québec dont il devient l’agent régulier dans la région. Alexis Tremblay Picoté, selon les livres de Price, effectue depuis 1832 des ventes de bois et de d’autres fournitures. Il est de plus gardien de marchandises de l’entreprise à La Malbaie. En 1836, il fait construire avec quelques associés un moulin à scie dans le secteur de la Chute (aujourd’hui Clermont). William Price achète par la suite les droits de d’autres associés alors que Tremblay Picoté demeure gérant du moulin de la Chute. Toutefois, c’est davantage le riche potentiel de l’arrière-pays de Charlevoix qui intéresse alors les commerçants de bois. 
 
Alexis Tremblay Picoté joue un rôle actif dans l’ouverture du Saguenay. Ce territoire fait partie jusqu’en 1842 du Domaine des Postes du Roy, dont l’exploitation est laissée à des sociétés notamment la Compagnie de la Baie d’Hudson. La colonisation du territoire est alors interdite. Alexis Tremblay Picoté fait circuler avec d’autres citoyens de La Malbaie une pétition afin d’ouvrir le Saguenay à la colonisation en 1835 et en 1839 de même que participe à l’élection du Patriote Charles Drolet en 1836 favorable à cette mesure. Ces démarches de Tremblay Picoté dénotent sans doute davantage son intérêt vis-à-vis le bois présent au Saguenay que de l’avenir de l’agriculture dans cette région. 
 
Thomas Simard obtient en 1837 un permis de coupe de bois au Saguenay et il se tourne alors vers Alexis Tremblay Picoté afin de former une société par action afin de défrayer une partie du montant de la caution demandée par la Compagnie de la Baie d’Hudson, alors locataire du Domaine des Postes du Roy. La Société des Vingt-et-un est formée la même année à La Malbaie. Le marchand William Price finance secrètement l’entreprise. Alexis Tremblay Picoté se charge lui même de négocier la vente de la production de bois avec ce dernier. Il empoche une commission de 5 %. La Société connaît rapidement des ratés. William Price achète alors les parts des actionnaires démissionnaires et devient l’unique actionnaire. Le 2 octobre 1842, le Saguenay est ouvert à la colonisation. Price possède alors une longueur d’avance sur ses concurrents possédant la majorité des moulins à scie au Saguenay. Toutefois, le rôle d’Alexis Tremblay Picoté dans ce territoire s’amenuise. 
 
En effet, le développement rapide du Saguenay donne naissance à une élite locale. En novembre 1842, Peter MacLeod Jr s’associe à William Price et devient surintendant de ses établissements du Saguenay. Tremblay Picoté ne garde que la gérance de l’établissement de Grande-Baie. Alexis Tremblay Picoté tente alors une nouvelle expérience et forme en 1844, avec quelques associés, la Société du Saint-Laurent pour l’exploitation des secteurs de Sault-au-Cochon et de la baie-de-Laval, sur la Côte-Nord. Un chantier de coupe de bois est ouvert à Portneuf (seigneurie de Mille-Vaches). Il travaille alors pour James Gibb un marchand de la ville de Québec. Alexis Tremblay Picoté collabore encore avec William Price jusque dans les années 1850 dans quelques entreprises. Il débute à la même époque à céder ses biens à ses enfants. 
 
Alexis Tremblay Picoté décède le 24 janvier 1859 dans la paroisse de Saint-Étienne-de-la-Malbaie. Sans nul doute, il a réussi au cours de sa vie à s’imposer dans l’élite marchande de La Malbaie. Toutefois, le travail d’Alexis Tremblay Picoté a davantage bénéficié à la bourgeoisie coloniale en permettant l’ouverture du Saguenay à l’exploitation forestière et en favorisant ainsi la création d’un empire commercial : la William Price and Sons Co. 
 

Bibliographie :

Lalancette, Mario. « Alexis Tremblay Picoté (1787-1859) », Revue d’histoire de Charlevoix, 2, 1, octobre 1987, p. 9-12. 
 
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