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Le Diable constructeur de pont et d’église
Thème : Culture

Le Diable constructeur de pont et d’église

Serge Gauthier. Historien et ethnologue. Président de la Société d’histoire de Charlevoix. Notre-Dame-des-Monts. 26 septembre 2002


Depuis 1999, un nouveau pont enjambe la rivière Malbaie dans la municipalité de la Malbaie afin de traverser sur la rive est et d’aller ainsi vers la Côte-Nord par la route 138. Il remplace un autre pont nommé le « pont Arthur-Leclerc » en l’honneur du député provincial de l’époque et qui a été placé là en 1956. Mais, avant cette date, il y avait un pont de fer à La Malbaie datant du début du XXe siècle. En principe, comme les autres ponts qui lui ont succédés ce dernier semble avoir été construit par l’autorité du ministère de la Voirie du Québec. Toutefois, selon la légende, il n’en est rien et il aurait même construit avec l’aide du Diable lui-même.
 
Au début du XXe siècle, il est encore courant de faire appel à une corvée populaire afin de construire un pont. C’est le cas à La Malbaie. L’automne durant le chantier se déroule plutôt bien mais il paraît clair que l’échéancier prévu risque de ne pas être respecté. L’hiver approchant qui rend la suite des travaux difficile voire impossible, les habitants de La Malbaie commencent à craindre que le pont ne soit pas terminé à temps. Il se présente alors un étranger qui s’offre afin d’achever la construction du pont. Nul ne le connaît. Il ne demande aucun salaire et son offre généreuse est acceptée.
 
La construction du pont de fer de La Malbaie se termine alors en moins de quinze jours. Certains commencèrent à reconnaître Satan sous les traits de l’étranger et la rumeur circula qu’il voudrait en échange de ses services recueillir l’âme de la première personne à traverser le pont. Le jour de l’inauguration du pont aucun des dignitaires présents n’accepte de traverser le pont afin de l’inaugurer. de même, aucun autre habitant de La Malbaie ne semble intéresser à traverser le nouveau pont. La femme du charpentier du pont décide alors d’envoyer son chat traverser le pont et ce fut la seule âme que recueillit le Diable ce jour-là. Par la suite, tous ont accepté de traverser le pont qui dessert La Malbaie durant près de soixante années.
 
Aux Éboulements, selon la légende, le Diable participe plutôt à la construction d’une église. Au tournant du XVIIIe siècle, il apparaît clair aux paroissiens des Éboulements que l’église paroissiale située sur le bord du fleuve est trop éloignée de l’ensemble de la population qui réside en majorité sur le plateau. Les paroissiens décident donc de reconstruire leur église sur le plateau en utilisant les matériaux du temple situé sur la rive dans la construction de la nouvelle église. Cette idée est excellente mais les paroissiens ont négligé de considérer la longue montée que doivent faire les chevaux afin de transporter les matériaux des Éboulements en bas jusque sur le plateau. Les chevaux peinent et peinent. Le travail ne se fait pas très rapidement. 
 
Se présente alors un inconnu qui offre ses services. Il possède un magnifique cheval blanc attelé à un énorme charriot. Après un premier voyage de pierre taillée, le cheval n’est même pas fatigué. Il travaille ainsi sans relâche la journée durant. Les travaux sont réalisés rondement en grande partie grâce à l’étranger et à son beau et vaillant cheval blanc. À la fin des travaux, le mystérieux personnage et son cheval disparaissent comme ils sont venus. Personne ne les a revu par la suite. La légende transporte depuis la rumeur que c’est le Diable lui-même qui a assisté les paroissiens des Éboulements dans la construction de leur nouvelle église. En 1934, cette église fut incendiée. Elle est rapidement remplacée par un temple à peu près semblable et qui existe toujours dans la paroisse de Les Éboulements.
 
Le Diable constructeur de pont et d’église est-ce vraiment sérieux? De nombreuses légendes existent à ce sujet dans Charlevoix. Plus personne ou presque n’y prête vraiment attention. Ces histoires sont amusantes sans plus mais comme elles nous racontent l’histoire locale, leur côté pittoresque demeure. En fait, elles témoignent d’une mentalité ancienne et de croyances religieuses d’hier. À cause de cela, il est intéressant de les garder en mémoire et même de les raconter encore.
 
Bibliographie :

Revue d’histoire de Charlevoix, 22, septembre 1995, 40 p.
 
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